La Direction des Parcs Nationaux, la police de Kaolack avec l’appui de WARA, ont arrêté un trafiquant majeur en flagrant délit de détention, circulation, commercialisation de dépouilles d’espèces animales intégralement protégées. Arrêté dans un grand l’hôtel de Kaolack le vendredi 21 octobre, Abdou Karim DIOP, était en possession de têtes de lion et léopard. Immédiatement, une perquisition à son magasin au marché central a été autorisée par le Procureur de République de Kaolack. Lors de cette perquisition, 7 trophées de lions et de léopards ont encore été saisis. Au total, c’est 106 peaux provenant de 22 espèces animales différentes qui ont été trouvées sur place et saisies ; lion, léopard, serval, loups, crocodile, pythons, guib, buffle de forêt, loutres, etc. La saisie comprend les dépouilles de 12 espèces animales intégralement protégées. Les animaux intégralement protégés, étant menacés d’extinction dans leur milieu naturel, bénéficient d’une protection absolue sur toute l’étendue du territoire national, il est interdit de les abattre, de les détenir et d’en faire commerce.
Une nouvelle fois, cette opération a mis en évidence l’importance du commerce illicite de lion avec la saisie des dépouilles de plusieurs lions et également un (1) lionceau. Rien que la valeur des produits de lions et panthères saisis représente plus de 2,5 millions de FCFA, soit 4000 euros, sans parler de la centaine d’autres peaux d’une valeur inestimable.
Cette affaire n’est pas sans nous rappeler une affaire similaire, en novembre 2014 des trafiquants Nigériens avait été arrêtés par les Eaux et Forest et la Division des Investigations Criminelles (DIC) avec l’appui de WARA avec une saisie record de 2634 peaux de félins et autres espèces. Cette action forte avait été fortement saluée par la communauté internationale et tellement la prise était importante.
Ce réseau dakarois, dont DIOP de Kaolack fait partie, a des fournisseurs dans de nombreux pays et est impliqué dans le trafic international de grande échelle, en important illicitement depuis le Niger, Guinée, Mali, Kenya et autres pays africains ; et en exportant en Europe ou vendant aux étrangers présents au Sénégal. Les informations récoltées indiquent la fréquence à laquelle ce genre de contrebande se fait régulièrement à l’échelle internationale vers Dakar. Le Sénégal est un point chaud du trafic international de peaux. La corruption est souvent utilisée par les trafiquants pour traverser les frontières dans le monde.
Après son arrestation DIOP a avoué lors de son interrogatoire que les peaux de lions et léopards viennent de diverses régions d’Afrique en citant le Mali et Kenya, mais aussi le Parc National du Niokolo Koba et ses alentours. Il est choquant que les lions du Sénégal, qui sont gravement menacés et très peu nombreux (moins de 50 individus), fassent l’objet d’un trafic national et international.
Selon Charlotte Houpline, fondatrice de WARA, le Sénégal doit réprimer et sanctionner sévèrement les trafiquants pour sauver ses derniers lions et sa faune. Si on laisse les trafiquants agir en toute impunité, alors le trafic continue et les lions disparaissent, c’est aussi simple que ça. Dans ce système, un trafiquant peut commander 100 ou 200 braconniers dans plusieurs pays, ils n’ont qu’un coup de fil à passer aux braconniers pour qu’un lion soit abattu. Cette arrestation va donner un signal fort aux trafiquants sur la volonté des autorités sénégalaises de lutter contre le trafic et de faire appliquer la loi. Il faut saluer le travail exceptionnel réalisé par la DPN et la Police.
Le sieur DIOP risquerait une peine d’emprisonnement allant jusqu’à 5 ans s’il est retenu contre lui le délit de complicité d’abattage au motif que les peaux saisies dégagent une forte odeur nauséabonde et typique d’un abattage récent. Placé en garde à vue le 21 octobre, puis déféré au parquet du tribunal de grande instance de Kaolack, le sieur Diop est placé sous mandat de dépôt depuis le lundi 24 octobre. Il devrait être jugé dans les jours à venir. Les peaux et trophées saisis ont-eux été mis sous scellés ; le tribunal de grande instance statuera sur la confiscation.
Il faut espérer que cette opération attirera l’attention de la communauté internationale sur le sort des lions en Afrique et sur le fait que le commerce illicite qui les menace d’extinction est largement sous-estimé. Des échantillons ont été prélevés sur les peaux de lions saisis afin que les analyses ADN permettent de mieux pouvoir cartographier le trafic organisé des lions en Afrique. Déjà, l’analyse ADN des peaux de lion saisis à Dakar en novembre 2014, faite par le Muséum d’Histoire Naturelle de New-York, a révélé que les lions avaient été abattus au Cameroun.
Les lions sont proches de l’extinction en Afrique de l’Ouest. Les scientifiques estiment qu’il ne reste que 250 lions vivants dans la sous-région. Pour le continent, la population se trouve à 4% de la population des années 1940 et le taux de déclin des populations de lions ne fait que s’accélérer. Trop de pays, Ghana, Côte d’Ivoire, Congo, Gabon n’ont déjà plus de lions, et le Nigeria, le Kenya et l’Uganda prédisent des extinctions locales dans les prochains dix ans. En dehors du commerce illicite, la chasse sportive est significative pour la mortalité des lions et évidemment pourrait plus facilement être empêchée. La base de données CITES liste un total de 6,652 trophées de lions exportés entre 2000 et 2009.
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